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Les incertitudes sur la demande font pression sur les prix des céréales

La parité de l'euro par rapport au dollar à 1,178 et la chute des prix du blé à Rouen alourdissent un contexte incertain, entre bonnes perspectives de production en France et inquiétudes sur la demande et les échanges internationaux.

L’instabilité sur la demande pèse sur un marché des céréales déjà fragilisé par la remontée de l’euro et des tensions commerciales à l'international.

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Nouveau record pour l’euro par rapport au dollar à 1,178, impactant une fois de plus la compétitivité française, à l’heure où les blés ont récemment touché un plus bas depuis avril 2024 à Rouen. Les annonces de droits de douane entre les États-Unis et l’Europe attendues dans les prochains jours seront clé dans les échanges de la prochaine campagne. En France, les perspectives de production en blé paraissent bonnes, mais le contexte reste incertain concernant la demande et l’équilibre du bilan pour la prochaine campagne.

De premiers bons échos de rendement en blé français

En cette période de moisson les opérateurs sont concentrés sur les premiers échos de rendements en France, d’autant plus après la très mauvaise année passée encore dans les mémoires. Après la bonne surprise des orges fourragères globalement dans l’hexagone, les premiers retours sur les 11 % récoltés au 30 juin montrent de bons potentiels en France. Le Crop tour Argus fait état d’une production estimée à 33 millions de tonnes.

Les destinations feront l’objet d’attention de la part des opérateurs, avec en point d’orgue la demande à l’international. Avec un potentiel estimé à 8 millions de tonnes sur les exportations vers les pays tiers, la compétitivité du blé français sera un point majeur dans l’équilibre du bilan. Les stocks de fin de campagne sont en effet attendus à 3,9 millions de tonnes, au plus haut depuis 2004, ne laissant pas de choix aux exportateurs quant à l’obligation de gagner des parts de marché.

Les prix mer Noire feront l’objet d’une attention particulière dans les prochains mois, alors que les premiers échos de rendement arrivent. Des craintes concernant certaines régions de Russie seront à confirmer, mais pour l’heure participent au soutien des cours. Dans un contexte de rachats de positions de la part des fonds financiers, les cours du blé marquent une légère fermeté après les plus bas atteints à 190 €/t au début de juillet à Rouen base juillet, pour s’afficher à 193,25 €/t. Des éléments manquent encore cependant à ce jour pour considérer un réel changement de tendance, mais les prochaines semaines seront cruciales pour la confirmation des potentiels dans l’hémisphère Nord.

La vague de chaud en Europe pourrait impacter le potentiel en maïs

Après avoir touché un plus bas à 173 €/t base juillet rendu Bordeaux à la mi-juin, les cours du maïs retrouvent des couleurs en s’affichant désormais à 189 €/t, niveau abandonné depuis le mois de mai. Les bonnes perspectives européennes attendues par les opérateurs depuis plusieurs mois, commencent maintenant à faire l’objet de craintes. La vague de forte chaleur des dernières semaines a en effet atteint le potentiel de –1,7 millions de tonnes, selon Argus, pour une production estimée à 58,6 millions de tonnes européenne et britannique.

À défaut de pluies d’ici à la fin de juillet, les dégâts pourraient encore s’accroître avec une nouvelle perte de 3 millions de tonnes. Cela vient s‘ajouter aux premières craintes sur les rendements concernant certaines régions en Russie pour les blés, dans un contexte de position vendeuse record sur les fonds financiers. Dans ce contexte, les fonds européens et américains réduisent leur exposition en rachetant des contrats pour réduire leur position vendeuse. Ce mouvement soutient le marché de Chicago, dont les cours atteignent 4,21 $/bu sur l’échéance de septembre 2025.

Ailleurs dans le monde, les perspectives s’annoncent bonnes avec au Brésil un potentiel revu en hausse à 137 millions de tonnes, s’ajoutant aux 400 millions de tonnes attendues aux États-Unis. La pression de la récolte brésilienne risque donc de peser sur les cours internationaux, à l’heure où les incertitudes sont grandes concernant la demande avec les futurs droits de douane attendus aux États-Unis. Des annonces pourraient arriver en amont de la date butoir du 9 juillet, impactant ainsi les flux de la nouvelle campagne et pouvant rebattre les cartes du marché mondial.

Chute des cours du colza, entre bonnes disponibilités en Europe et soutien potentiel du biodiesel

À l’inverse des cours des céréales depuis quelques jours, le marché du colza continue sa chute entamée depuis l’annonce du cessez-le-feu en Iran. La graine de colza Fob Moselle perd presque 40 €/t depuis 10 jours pour s’afficher à 462 €/t, dans un contexte de bonnes avancées de récolte en France et dans le sud de l’Europe. Les retours de rendement montrent des résultats optimistes par rapport à la moyenne des dernières années, notamment dans le sud de la France mais aussi en Roumanie. La production européenne pourrait cette année être supérieure à 20 millions de tonnes en Europe et Grande-Bretagne, en forte hausse par rapport aux 17,6 millions de tonnes de l’an passé.

À ce bilan qui parait optimise en Europe, s’ajoutent de bonnes perspectives également en Russie, marché dont l’importance s’accroît depuis ces dernières années, avec un potentiel de production attendu à 5,8 millions de tonnes. En revanche, l’Ukraine est moins chanceuse, après de mauvaises conditions climatiques au printemps réduisant le potentiel de production à seulement 3,4 millions de tonnes, soit le plus bas depuis 2021.

Sur le marché des huiles, la pression est de mise à Rotterdam pour les quatre huiles végétales entraînées par la chute du palme sous les 4 000 ringgits la tonne. Les nouvelles réglementations en biodiesel seront à suivre tant aux États-Unis qu’en Europe. En Allemagne, le projet de loi visant à privilégier l’utilisation de biocarburants à base de colza pourra être un réel soutien si l’application est confirmée pour janvier 2026.

Enfin le marché du colza français fait de nouveau l’objet d’inquiétudes à la suite d’un accident de navigation qui a endommagé une écluse sur la Moselle à Saint-Aldegund en Allemagne. De même qu’en décembre, les flux pourraient être ralentis, et feront l’objet d’attention des opérateurs ces prochains jours.

Un bilan excédentaire pour le soja

Les cours du tourteau de soja délivré Montoir continuent leur chute et atteignent des plus bas depuis mars 2019, à 303 €/t. Avec un fort niveau de trituration en Europe et outre Atlantique, le coproduit qu’est le tourteau ne trouve pas suffisamment preneur pour équilibrer un bilan excédentaire. Avec près de 170 millions de tonnes de soja attendues au Brésil, et 118 millions de tonnes aux États-Unis, le marché mondial semble bien approvisionné pour les prochains mois.

La question se pose maintenant sur les aspects géopolitiques, avec aux États-Unis, un soutien pour l’huile de soja. Les déclarations du gouvernement américain sur la mise en place du Z45 poussent le marché à anticiper une réduction des importations d’huiles étrangères afin de favoriser une hausse de la consommation de l’huile de soja et des huiles importées en provenance du Mexique et du Canada.

Ces perspectives sont favorables à une nouvelle augmentation de l’activité de trituration de soja en nouvelle campagne, sans pour autant que les débouchés soient plus nombreux pour les tourteaux. Les nouvelles règlementations en Europe seront également à suivre, avec un nouveau projet de loi en Allemagne visant à privilégier l’utilisation de biocarburants à base de colza, plutôt que de soja ou de palme. Ce projet de loi doit encore être discuté avant une possible application en janvier 2026. Enfin, la parité de l'euro par rapport au dollar sera à surveiller avec un nouveau record à 1,177, favorisant pour les imports européens.

À suivre : négociations tarifaires avec les États-Unis, évolution de la parité de l'euro par rapport au dollar, conditions climatiques en Europe pour le maïs, compétitivité du blé français, retour des premiers rendements de blé sur le continent Europe, développement des cultures de printemps en Amérique du Nord.

(1) Argus Media, société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.

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